jeudi 8 mars 2018

Haiti Info:Le nombre d'immigrants haïtiens qui arrivent actuellement au Chili ne cesse d’augmenter de manière exponentielle. Un total de 104 782 compatriotes sont entrés au Chili en 2017, soit 114% de plus qu’en 2016 quand 48 783 s'étaient installés sur le territoire chilien

Sans visa, aucun Haitien ne pourra plus aller au Chili./Photo: hpn

C’est le ministre chilien des Affaires Étrangères qui a adressé une requête à la chambre des députés du Chili. Pour éviter ce flot d’haïtiens qui débarquent en masse dans ce pays sud-américain sans document légal, M. Heraldo Benjamín Muñoz Valenzuela voudrait désormais que tout Haïtien qui souhaite visiter le Chili ou y séjourner à titre de touriste devrait détenir un visa. Selon l'ambassade du Chili en Haiti, il n'est pour le moment pas nécessaire d'avoir un visa pour visiter le Chili si le séjour ne dépasse pas 3 mois.

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Face au boom exponentiel de la migration haïtienne au Chili, Marckenson Jean-Baptiste, jeune ingénieur industriel, étudiant en master en études internationales au Chili (Instituto de estudios avanzados- Universidad Santiago de Chile) après 5 années d’études en République dominicaine, a choisi de ne pas rester indifférent. Une année seulement depuis son arrivée sur la terre de Pinochet, le jeune ingénieur se démène pour faciliter l’intégration haïtienne au Chili. De passage en Haïti, Marckenson Jean-Baptiste a rendu visite à la rédaction où il a clairement exposé le but de son voyage qui consiste à exhorter ses compatriotes à mieux s’informer avant de se déplacer afin de prendre une décision équilibrée.
Le désir de migrer d’un pays à un autre est un droit. Marckenson Jean-Baptiste le reconnait volontiers. C’est pourquoi il s’est donné comme objectif d'entreprendre ce voyage. Ce dernier ne veut ni inciter ni dissuader quiconque désireux de se rendre au Chili. Au contraire, sa passion d’aider son prochain, que n’altère en rien cette position neutre, le pousse à diversifier son activisme. Au Chili, il donne un coup de main par-ci, par-là, à toutes les organisations qui font appel à lui. De passage en Haïti, il donne des conférences (dont une à la FOKAL, le 15 février dernier) et multiplie les tournées médiatiques.
Il se dit déterminé dans son engagement à aider les Haïtiens susceptibles de se faire exploiter à leur arrivée au Chili. Car, si ces derniers arrivent à s’adapter tant bien que mal au climat, très différent de celui d’Haïti, la langue demeure, aux dires de Marckenson Jean-Baptiste, un obstacle à leur pleine et entière intégration. C’est la raison pour laquelle beaucoup d’organisations mettent en place des cours d’espagnol pour venir en aide aux Haïtiens.
Dans les dix prochaines années, les Haïtiens peuvent former une communauté au Chili, peut-être même une élite économique. Pour ce faire, nos compatriotes doivent réussir leur intégration autrement. « Les Haïtiens ne pensent qu’au travail », déplore Marckenson Jean-Baptiste, précisant au passage qu’ils commencent à s’organiser. Ils peuvent mieux s’organiser, concède-t-il.
La cohabitation entre Haïtiens et Chiliens commence doucement à prendre forme. Toutefois, Jean-Baptiste rapporte que dans certaines provinces beaucoup de Chiliens déguerpissent pour laisser la place aux nouveaux arrivants. « Tout comme il y a des Chiliens qui vivent avec des Haïtiens », reconnait le jeune ingénieur haïtien, espérant une amélioration de la cohabitation avec le temps.
Une ombre au tableau cependant, le retour au timon des affaires du président Sébastian Piñera. Marckenson Jean-Baptiste se rappelle que sous le premier mandat de Piñera (2010-2014), le taux de refoulement des migrants était plus élevé que celui des années de présidence de la socialiste Michelle Bachelet. Toutefois, il se veut optimiste car, dit-il, en bon homme de la droite, le milliardaire fera de la création d’emplois sa priorité. Or, la création d’emplois nécessite une main-d’œuvre disponible. Et pour cause, la main-d’œuvre locale est vieillissante (en 2020, les plus de 65 ans seront plus nombreux que les plus de 25 ans) et que les Chiliennes ne reproduisent pas beaucoup.
En général, la main-d’œuvre haïtienne est très bien accueillie, constate Marckenson Jean-Baptiste. Parmi les secteurs d’activités dans lesquels évoluent nos compatriotes, il évoque la construction, l’agriculture (cueillette des raisins), l’assainissement et le secteur public (comme traducteur dans les hôpitaux surtout).
Comme il fallait s’y attendre, la vague de migrants haïtiens qui déferlent sur le Chili ne passe pas inaperçue. Il y a beaucoup d’étudiants qui consacrent leur thèse à la migration haïtienne, révèle Jean-Baptiste. La migration haïtienne est le nouveau sujet à la mode qui capte l’attention des investigations scientifiques, des politiques publiques et des médias. « Il y a des médias là-bas qui montrent une bonne image d’Haïti tout comme il y en a qui montrent les mauvais côtés du pays », fait-il remarquer.
Ces images, dit-il, comme celles du documentaire « Adios Haiti » de Canal 13 diffusé en début d’année, ont tendance à nous affaiblir aux yeux des Chiliens et traduisent aussi l’incapacité de nos élites à nous offrir mieux depuis 1986. D’où cette fuite massive de cerveaux, cette saignée. Pour les organisations qui travaillent à promouvoir une meilleure image des Haïtiens au Chili et à les orienter pour faciliter leur intégration, la tâche est rude.
L’une d’entre elles, « INTERPRETA », avec laquelle Marckenson Jean-Baptiste collabore, a développé une application mobile « T-ZEN » qui fournit une assistance gratuite aux migrants les aidant à trouver un emploi, entamer le processus de légalisation de leur statut et leur offrir des cours d’espagnol. C’est le grain de sable de ce dernier dans cet océan migratoire de nos compatriotes qui se déversent à flots sur les rives chiliennes.

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